... Dimanche matin, nous reprenons le cours de notre périple. Aujourd'hui : cap sur l'est du Cotentin... Le soleil et le ciel bleu sont toujours avec nous et les paysages se succèdent, plus beaux les uns que les autres... Vers 13 h, on se dit qu'on casserait bien une p'tite graine et on cherche un resto, si possible avec vue sur la mer... Sitôt repéré, sitôt adopté. Tout y est, la vue sur la mer immense, la salle presque rien que pour nous : les autres clients sont en terrasse... On préfère regarder la mer derrière les larges baies vitrées, surtout qu'au loin, un p'tit nuage semble annoncer une ondée...
Le service est rapide, efficace et charmant... La carte variée, des plus appétissantes... Tchin Tchin on trinque !
Hélas, trois fois hélas, notre tranquilité n'est qu'éphémère
... La table ronde, derrière Mamina et M. Ciboulette, attend ses convives... Apparemment on fête un évènement familial : une composition florale trône en son centre... En effet.... la famille s'annonce, l'aïeule, la fille, le gendre, la belle-fille, le fils, la petite-fille et l'arrière petit-fils... précédés par... deux chiens, un gros et un petit, lesquels s'ébrouent joyeusement après s'être éclatés sur la plage et s'apprêtent à cantiner sous la table
La petite fille, environ la trentaine, et accessoirement aussi mère de l'arrière-petit-fils, semble être propriétaire de la meute... L'oncle, à la simple idée de devoir supporter l'odeur de chien mouillé, prie sèchement sa nièce de les débarrasser de leur vue... La nièce émet un zeste d'explication... On lui fait comprendre que c'est pas négociable... Contrariée, les chiens sur ses talons, et l'énoooooooorme gamelle en plastique bleu dans les mains, la nièce et ses compagnons à quatre pattes sortent.... On l'a échappé belle
Elle revient.... La famille prend place... Avec Papili, on les a en ligne de mire et on jouit du spectacle... Mamina et M. Ciboulette qui leur tournent le dos, demandent "queskispasse...".... Entre deux crevettes au beurre d'escargot, Papili et moi zyeutons de tous nos zyeux et rendons compte des évènements en cours...
Si chuis miro, chuis pas sourde... Si j'en crois la rumeur qui vient de la table, c'est l'aïeule qui régale... L'a pas lésiné sur le menu : champagne et homard pour tout le monde... L'arrière petit-fils 7/8 ans, du genre ch*** comme la pluie, a droit à un menu junior 3*** : j'ai pas bien vu c'que c'était, mais yavait de la crème... J'm'en souviens bien, vu que ça a fait tout un pataques... "Le p'tit aime pas ça" chouine la mère... après lui avoir noué sa serviette autour du cou, coupé le truc à la crème en chtis morceaux.... et donné la becquée .... L'oncle suggère de le laisser se dém*** avec son assiette... La nièce et mère persiste dans son rôle de mère nourricière.... La tante... tente, c'est le cas de le dire, une diversion avec ses points de croix... La grand-mère du chieur et mère de sa mère s'extasie sur lesdits points de croix de sa belle-soeur.... Le grand-père du chieur assure sa mère (du chieur) et sa fille (à lui) qu'à cet âge là on peut se voir confier ses couverts... et qu'au pire, ils sont 6 adultes autour de cette table pour l'empêcher de se crever les yeux... L'aïeule observe de plus en plus agacée sa petite fille et mère de son chieur d'arrière-petit-fils, et demande "si c'est normal à c't'âge-là de pas manger tout seul ?"
Malgré les conseils sages et avisés des ascendants sur la nécessité de laisser le chieur vivre sa vie à table, sa mère s'entête à lui faire avaler quelques bouchées de chose à la crème et geins "qu'il aime pas ça, qu'il a pas l'habitude, qu'on aurait pas du, qu'on aurait du... qu'il faudrait p'têt voir à lui faire servir aut' chose..."
L'ambiance devient électrique... Avec Papili, on en perd pas une miette.... Mamina et M. Ciboulette n'en ont que les échos et sont au supplice... L'aïeule à qui la mayonnaise du homard commence à monter au nez s'agite sur sa chaise de manière inquiétante... Ses fille et belle-fille proposent un débat sur le coton à broder... Son fils et gendre se demandent qui de la mère du chieur, ou du chieur lui-même va ramasser le premier une claque sur le museau...
On est au dessert... La mère du chieur s'obstine toujours.... Tout en réclamant aut'chose pour la chair de sa chair.... Les serveuses s'inquiètent des éclats de voix qui leur parviennent et s'enquierent du pourquoi du comment... La mère du chieur demande "pourquoi on a mis de la crème dans les choses du p'tit et patati et patata..."... Une serveuse tente d'expliquer que c'est exceprès et que la recette des choses en question réclame sa dose de crème fraîche.... Mamina et M. Ciboulette n'en peuvent plus... Papili et moi, on cherche même plus à faire semblant , tant le débat est passionnant... L'aïeule au bord de l'esclandre, prie qu'on veuille bien faire venir le cuistot pour expliquer à la mère du chieur "pourquoi qu'ya de la crème dans les choses du p'tit..."
Tel Zorro, le cuistot surgit du fond de sa cuisine et répond de manière fort urbaine, aux questions sur la crème dans les choses du chieur... Un compromis est trouvé.... Les choses à la crème sont enlevées illico, des frites/jambon (chuis presque sûre pour les frites, mais pas pour le jambon...) sont servis prestissimo...
Enfin la paix : ils peuvent passer à la suite du menu... Et nous au café et à l'addition...
C'était trop beau : le chieur décide aussitôt d'alterner la visite de la salle en long, en large et en travers et le picorage des frites en des positions diverses et variées : debout, sur ses genoux, sur ceux de sa mère....
On a pas pu attendre pour voir si le chieur allait tenter le mastiquage des frites sur les genoux de l'aïeule ...
Ben voui.... le gigot de Mamina attendait notre retour avec impatience .... La preuve